Pourquoi on s'appelle La Pâtisserie Numérique ?

Non, on ne fait pas que des gâteaux sur écran à La Pâtisserie Numérique. Mais on imprime en 3D des créations pâtissières, sucrées ou salées, avec une précision inédite. Ce nom qui étonne, “La Pâtisserie Numérique”, raconte une rencontre entre deux passions : la fabrication additive et la gourmandise.

I. Un nom qui intrigue : entre tradition et innovation

14 novembre 2024, je suis dans la belle salle des fêtes de la mairie de Tours ; à l’occasion des Rencontres Rabelais de la Gastronomie. Les discours des officiels se succèdent et voici le tour de l’adjointe au maire. Elle conclue son speech par cette phrase inoubliable « il y a une camionette garée dans la cour avec marqué dessus « La Patisserie Numérique », je ne sais pas ce que c’est, je ne sais pas si cela se mange, mais j’ai hâte de voir ! »

Ce nom qui crée la surprise, qui interpelle les interlocuteurs je ne l’ai pas choisi par hasard et il a sonné rapidement comme une évidence. Car il décrit littéralement ce que nous faisons : de la pâtisserie grâce aux technologies numériques, de la pâtisserie avec des zéros et des 1.

Et si vous êtes nouveaux par ici, bonjour à vous je suis Marine, la fondatrice de la Patisserie Numerique. Après une expérience réussie dans l’impression 3D à la tête de la startup Sculpteo, j’ai poursuivi dans le monde fabuleux de la fabrication additive, en appliquant ces technologies qui m’enthousiasment depuis plus de 15 ans à ma passion : la cuisine, et en particulier la pâtisserie.

II. La genèse du nom : une vision dès le départ

Après avoir développé la startup Sculpteo pendant plus de 7 ans, je suis passé à un nouveau chapitre en septembre 2018 ; quelques mois avant sa revente à la société BASF. En quittant ce beau navire que j’avais tant contribué à renforcer et faire grandir, j’avais des convictions et des frustrations.

Parmi elles, il y avait le nom de notre startup, qui a été choisi avant mon arrivée par les autres associés. C’est un chouette nom mais ce n’est pas évident de comprendre que Sculpteo fait de l’impression 3D. On comprend que cela a avoir avec la sculpture, et d’ailleurs on m’a parfois demandé si nous faisions des outils pour les sculpteurs ou si on était spécialisé sur le marché artistique. Quand on connait le domaine d’application de Sculpteo, on la trouve très bien cette marque, mais elle n’est pas signifiante en soi.

Donc parmi les choses essentielles que je me suis promise en sortant de Sculpteo, il y avait :

  •           construire ma propre imprimante 3D, avec des vrais applications métiers
  •           avoir un nom de marque qui pourrait se comprendre de lui-même !

C’est au fur et à mesure de mes jours de formation au CAP Patisserie que le nom a commencé à émerger. Mais il s’est vraiment cristallisé lorsque j’ai présenté mon dossier à l’incubateur Smart Food de Paris&Co en Janvier 2019 : l’aventure de la Patisserie Numérique était née !

Pour la communauté de l’impression 3D et de la fabrication numérique, ce nom fait complètement sens, plusieurs journalistes tech m’ont d’ailleurs dit qu’il coulait comme une évidence. Mais tout le monde ne raccroche pas l’adjectif numérique, à la fabrication numérique… donc je pense avoir un peu raté mon coup ^^

Ce nom il promet de concilier deux mondes qui paraissent très éloignés : un métier ancestral, un univers très riche en savoir-faire et en transmission personnelle d’un côté et de l’autre un environnement dans lequel nous baignons au quotidien, mais extrêmement jeune au regard de l’acte millénaire de manger et de cuisiner.

Et cette volonté de conciliation, ou de réconciliation elle me tient à cœur, car j’avais à titre personnel envie de mettre mon énergie dans un univers qui rassemble, plutôt que ceux qui divisent.

III. Ce que ce nom dit de notre mission

Au-delà du « joli nom » , d’une promesse, maintenant que nous sommes 6 années plus tard, je suis toujours à l’aise avec l’expression « La Patisserie Numerique » car il est porteur d’intentions.

C’est une invitation à regarder la pâtisserie autrement, non pas comme une rupture avec la tradition, mais comme une continuité logique dans un monde qui évolue.

Notre mission, c’est de faire mieux avec moins : moins de gaspillage, moins de gestes répétitifs, moins de freins à la créativité.

C’est aussi une manière d’élargir le champ des possibles, en donnant aux artisans des outils nouveaux pour produire avec précision, pour innover, pour gagner du temps là où ça a du sens.

Et si on peut transformer des rebuts de coques de macarons en une pièce d’exception, c’est qu’on est sur la bonne voie. Si on peut imprimer un biscuit en forme de bijou ou une structure géométrique impossible à faire à la main, sans jamais trahir le goût, c’est qu’on est exactement à la croisée de ces deux mondes que je cherchais à faire dialoguer.

Pour amener les chefs à accepter l’expression « pâtisserie numerique », à accepter qu’une autre voie est possible que ce qu’ils ont appris à l’école il y a 15, 20, 30 ans auparavant, il fallait montrer précision et professionnalisme.

IV. Les réactions et ce qu’elles révèlent

Alors oui, ce nom interroge. Il fait sourire, il étonne, il suscite parfois un silence gêné ou un franc « je ne comprends pas ce que vous faites ». Et c’est justement ce qui me plaît.

Chez les professionnels, les réactions oscillent entre curiosité bienveillante et prudente perplexité. Certains viennent pour voir « la bête », d’autres pour comprendre si c’est vraiment bon, ou si c’est juste un gadget. Dans leur laboratoire, ils me reçoivent poliment ; et puis au fur à mesure ils comprennent qu’il y a vraiment quelque chose et qu’il ne va pas falloir passer à côté de cette révolution.

-          Parce que notre imprimante est autonome, productive et simple d’utilisation

-          Parce qu’elle permet de réaliser des formes belles et impossibles à réaliser à la main

-          Parce qu’elle est portée par une équipe passionnée, experte et tenace.

Ce que j’observe, c’est qu’à partir du moment où ils goûtent, où ils testent, où ils imaginent leurs propres usages, le regard change. L’intérêt pour une innovation responsable, qui s’inscrit dans les réalités économiques et créatives de leur métier, prend le dessus.

A la fin du rendez-vous, ils nous félicitent d’avoir mis au point une telle innovation mais souvent ils nous disent merci. Merci de faire évoluer leur métier, de chercher des solutions pour les laisser s’exprimer. Ce sont des moments tellement électrisants, car ils ont compris « la Pâtisserie Numerique », vraiment.

Et puis il y a cette fierté de montrer que la tech peut aussi être au service du sensible, de l’émotion, du beau et du bon. Que le numérique ne déshumanise pas forcément, qu’il peut, au contraire, donner du sens et du souffle à un métier ancestral. Et qu’au final, le numérique n’est pas qu’au service du virtuel, mais des choses tangibles, physiques. La pâtisserie est un moment de plaisir, très souvent partagé, associé pour chacun d’entre nous à des émotions heureuses.

Indirectement (très indirectement), notre entreprise est un vecteur de bonheur pour plus de gens, et c’est un sentiment très satisfaisant.

V. Ce que l’on construit sous ce nom

Aujourd’hui, « La Pâtisserie Numérique », c’est bien plus qu’un projet un peu fou. C’est une entreprise, une équipe, une imprimante 3D culinaire qui tourne dans des cuisines professionnelles.

Ce sont des années de R&D et des poudres développées dans notre laboratoire de Louviers, à base de blés normands. C’est une envie constante de faire dialoguer la science, le design, la matière et le goût.

C’est aussi une vision : celle d’une gastronomie française qui ne renie rien de son héritage, mais qui se donne le droit d’explorer de nouveaux territoires.

On imprime en 3D, oui. Mais on imprime surtout des idées, des envies, des histoires.

Et si demain, un chef peut transmettre son savoir-faire à un élève à l’autre bout du monde en partageant un fichier .stl, je crois qu’on aura écrit une page nouvelle. Une page juste. Pas gadget.

Et surtout : une page très gourmande.

 

 

 

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